Politique




Par Georges Apetsi - 13/08/2024
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Régime parlementaire : Les égarements d'un pouvoir empêtré dans le rafistolage coûteux

Mettre la charrue devant les bœufs. C’est l’expression qui sied le mieux à ce qui se passe actuellement au Togo. Alors que la constitution controversée qui bascule le pays dans un régime parlementaire a été promulguée depuis le 06 mai 2024, c’est maintenant que le gouvernement va prendre des cours sur les implications de sa réforme constitutionnelle auprès d’autres pays. Pendant qu’en interne, des émissaires sont déployés pour expliquer les biens fondés de ladite réforme aux populations, aux diplomates accrédités dans le pays et même aux ambassadeurs togolais. Sur quelle base?....

Malgré les critiques acerbes de l’opposition et la désapprobation d’une bonne partie de la population, le gouvernement togolais s’entête à faire passer le changement constitutionnel effectué nuitamment le 25 mars 2024 par des députés en fin de mandat. Au lendemain de cette réforme qui a surpris plus d’un aussi bien sur le plan national que sur l’échiquier international et face au tollé, le gouvernement avait dépêché ses émissaires dans certaines localités du pays pour tenter d’éteindre la vague d’indignation. Mais la mission n’a finalement été que révélatrice des contradictions du régime de Faure Gnassingbé.

Des contradictions à tous les étages

Il est de coutume, dans un Etat digne de nom d’explorer tous les tenants et aboutissants d’une réforme qui engage la destinée commune avant de l’adopter. Mais au Togo, cela ne semble pas être le cas. Tant qu’elle ne remet pas en cause la volonté de règne ad vitam æternam de Faure Gnassingbé, on fonce même les yeux fermés. C’est ce que le régime touché par l’andropause a encore démontré, basculant précipitamment le Togo dans un régime politique dont les tenants du pouvoir semblent n’avoir aucune maitrise.
La preuve, plus de quatre mois après l’adoption de la réforme contestée, le pays est plongé dans une incertitude institutionnelle et politique. C’est dans ce contexte qu’une délégation du gouvernement a été dépêchée en Inde pour, dit-on s’inspirer du régime parlementaire du pays. Un pays dont la démocratie parlementaire est remise en question depuis des décennies. Alors qu’aux premières heures de la réforme, les avocats du régime citaient en exemple les régimes parlementaires occidentaux.
A New Delhi, la délégation conduite par Gilbert Bawara a échangé avec le Président de la Lok Sabha (la chambre du peuple, pilier du système parlementaire indien), Shri Om Birla et suivi une formation sur les traditions, les pratiques et les procédures parlementaires dans le régime éponyme. Paradoxalement, il a y quelques jours, c’est le même Gilbert Bawara qui animait une session d’information à l’attention des missions diplomatiques accréditées au Togo sur les modalités d’application effective de la réforme. Curieux/ !
Pendant que des autorités togolaises prenaient des cours sur le régime parlementaire à New Delhi, à Lomé des ambassadeurs togolais tenaient une rencontre organisée par le ministre des Affaires étrangères, Prof Robert Dussey. Selon ce dernier, cette rencontre vise à leur « fournir des outils nécessaires » pour mieux « appréhender le changement politique majeur » opéré dans le pays.
Et pour cause. Comme la majorité des Togolais, les ambassadeurs n’ont pas une idée claire de cette constitution. Il fallait donc les instruire sur le sujet. « Vous aurez l’occasion de découvrir toutes les innovations apportées par le Président de la République dans cette constitution qui est indispensable pour la compréhension de chaque diplomate que vous êtes », a déclaré Robert Dussey qui n’apprécie pas le manque d’engouement autour de cette réforme. « Les positions du Togo sont dites, soit par le Président de la République, soit par la Première ministre ou le ministre des Affaires étrangères. Quand ces positions sont connues, les diplomates togolais sont censés veiller à promouvoir ces décisions », a-t-il lancé lors de la rencontre.
À entendre Robert Dussey, les ambassadeurs togolais ne défendent pas assez la constitution adoptée unilatéralement par le régime. « Ce que nous voulons et nous attendons de vous, c’est le courage. Je voudrais vous rappeler que le diplomate est aussi loyal, loyal envers son pays, loyal envers le Président de la République, loyal envers les décisions prises par le gouvernement », a martelé Robert Dussey face aux ambassadeurs.
De New Delhi à Lomé, on constate les contradictions du pouvoir de Lomé englué dans la perfidie. Des démarches atypiques d’un gouvernement égaré, à bout de souffle et qui ne cesse de montrer son incapacité à répondre aux besoins élémentaires des populations. Ce rafistolage visant à colmater les brèches à coup de stage et de communication stérile n’est pas sans conséquence sur les deniers publics.

Rafistolage couteux

En effet, depuis l’avènement de cette constitution, le gouvernement semble dépensé sans compter. Des campagnes de communication aux voyages officieux et officiels d’apprentissage en passant par des tournées de sensibilisations futiles, les maigres ressources de l’Etat sont dilapidées pour accomplir la volonté du régime de Faure Gnassingbé de confisquer le pouvoir. Et par conséquent, de faire fi des vœux légitimes de la majorité des Togolais de voir une alternance à la tête du pays.
Dans ces moments où nombre de nos concitoyens ont du mal à s’offrir un repas par jour, ces fonds auraient pu servir à financer des mécanismes de réduction de la pauvreté ou encore à subventionner les produits de première nécessité. Dans un pays où le bien-être des populations est une priorité pour les gouvernants, ces fonds seraient injectés dans l’amélioration des hôpitaux en matériels médicaux, dans la construction des salles de classe et des projets sociaux à fort impact. Mais rien de tout ça. La priorité est de faire en sorte que le prince reste au pouvoir contre vent et marrées.


Lemy Egblongbeli

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